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Le passage du Rhône par les troupes d’Hannibal

À la fin du mois d’août de l’an -218 avant J.-C., Hannibal se trouve confronté à la même situation qu’Alexandre devant l’Hydaspe : un large fleuve à franchir et, de l’autre côté une armée hostile, prête aux combat : celle des Gaulois. Hannibal fait ainsi traverser le Rhône à son armée, et notamment aux éléphants qui l’accompagnent depuis l’Afrique. Bien qu’un peu plus d’un siècle se soit écoulé depuis l’époque d’Alexandre, les techniques n’ont guère évolué. Tite-Live rapporte ainsi l’événement :

Déjà tout était à peu près disposé pour le passage ; mais on voyait avec effroi toute la rive opposée couverte de guerriers et de chevaux. Afin de les en déloger, Hannibal détache, à la première veille de la nuit, Hannon, fils de Bomilcar, avec un corps de troupes, la plupart espagnoles : il devra remonter le fleuve pendant un jour entier ; dès qu’il lui sera possible, le traverser dans le plus grand secret, et tourner l’ennemi, de façon à tomber, lorsqu’il en sera temps, sur son arrière-garde.

Les Gaulois qu’on lui a donnés pour guides lui apprennent qu’à environ vingt-cinq milles au-dessus le Rhône se partage pour former une petite île, et que là, plus large et partant moins profond, il peut offrir un passage.

Construction de radeaux



Là, on s’empressa d’abattre du bois, de construire des radeaux pour le transport des hommes, des chevaux et des bagages. Les Espagnols, sans aucun apprêt, jetèrent leurs vêtements sur des outres, se placèrent eux-mêmes sur leurs boucliers et traversèrent le fleuve.

Le reste de l’armée passa sur des radeaux que l’on avait joints, et vint camper près du fleuve. La marche nocturne et les travaux du jour l’avaient fatiguée ; elle prend vingt-quatre heures de repos : Hannon avait à cœur de suivre ponctuellement les instructions d’Hannibal. Le lendemain, il se met en marche, et des feux allumés annoncent qu’il a effectué le passage, et qu’il se trouve assez près des Volques.

Embarquement de l’infanterie et de la cavalerie

Hannibal

Hannibal

À cette vue, Hannibal, pour profiter de la circonstance, donne le signal de l’embarquement. Déjà l’infanterie avait ses canots prêts et disposés. Les cavaliers montaient les plus fortes barques, et conduisaient près d’eux leurs chevaux à la nage : ainsi rangés en première ligne, ils rompaient d’abord l’impétuosité du courant, et rendaient la traversée facile aux esquifs qui venaient après eux.

La majeure partie des chevaux, conduite avec une courroie, du haut de la poupe, traversait à la nage ; l’on avait embarqué les autres sellés et bridés, pour servir à l’instant même où l’on aborderait.

Les Gaulois accourent sur le rivage avec des hurlements confus et leur chant de guerre, agitant leurs boucliers au-dessus de leurs têtes, et brandissant leurs javelots : cependant, de leur côté, ils éprouvaient de la crainte à la vue de cette prodigieuse quantité de bâtiments contre lesquels le Rhône se brisait avec fracas ; ils étaient frappés des cris multipliés des matelots et des soldats qui s’efforçaient de rompre le courant du fleuve, ou qui, parvenus à l’autre bord, animaient leurs compagnons encore au milieu des eaux.

L’ennemi pris à revers

À l’instant où l’appareil terrible qui se déploie à leurs regards les glace d’épouvante, un cri plus formidable se fait entendre derrière eux Hannon a pris leur camp. Bientôt il paraît lui-même, et les Gaulois sont exposés à un double péril : ici, les vaisseaux vomissent à terre des flots d’ennemis ; derrière eux, une armée nouvelle les harcèle à l’improviste. En vain ils veulent opposer de la résistance ; repoussés sur tous les points, ils s’élancent par les issues qu’ils ont pu trouver, et pleins d’effroi, se dispersent çà et là dans leurs bourgades.

Hannibal fait aborder à loisir le reste de ses troupes ; il méprise désormais ses tumultueux ennemis, et assoit son camp.

La traversée des éléphants

On employa, je pense, divers moyens pour passer les éléphants ; ce qu’il y a de certain, c’est qu’ici les historiens varient beaucoup.

Traversée du Rhône par les éléphants d’Hannibal

Traversée du Rhône par les éléphants d’Hannibal

Quelques-uns prétendent qu’à l’instant où les éléphants étaient rassemblés sur la rive, le plus furieux de ces animaux, irrité par son cornac qui se jeta à la nage, comme pour éviter sa colère, s’élança à sa poursuite, et attira ainsi le reste de la troupe ; et qu’à mesure que chacun d’eux perdit pied, il fut, malgré sa frayeur pour les eaux profondes, entraîné à l’autre bord par le courant même. Toutefois il paraît plus constant qu’on les fit passer sur des radeaux ; c’était le parti le plus sûr, et il est probable qu’on le prit effectivement.

Un radeau de deux cents pieds de long, sur cinquante de large, partait du rivage et s’avançait dans le fleuve : pour qu’il ne fût point emporté par le courant, plusieurs câbles très forts le fixèrent à la partie supérieure de la rive ; on le couvrit de terre, et l’on en fit une espèce de pont, qui présentait une surface immobile, afin que les éléphants pussent y marcher hardiment.

Un autre radeau de même largeur, long de cent pieds, destiné à traverser le fleuve fut joint au premier ; et lorsque les éléphants, précédés de leurs femelles, étaient passés du radeau qui leur offrait la solidité d’une véritable route, sur celui qui s’y trouvait attaché, aussitôt on rompait les faibles liens qui retenaient celui-ci, et quelques vaisseaux légers l’entraînaient vers l’autre bord : ainsi l’on débarqua les premiers éléphants, et successivement toute leur troupe.

Ils n’éprouvaient aucune frayeur, tant qu’ils étaient sur cette sorte de pont assez ferme ; mais ils commençaient à témoigner de la crainte lorsqu’on détachait le second radeau qui les entraînait au milieu du fleuve.

Alors ils se serraient les uns contre les autres ; et, comme ceux qui étaient aux deux extrémités reculaient à la vue des flots, il y avait quelques moments d’agitation que la peur même apaisait bientôt, alors qu’ils se voyaient environnés d’eau de toutes parts.

Quelques-uns cependant se laissèrent tomber à force de se débattre, et renversèrent leurs cornacs ; mais leur masse même les soutint : peu à peu ils trouvèrent pied, et finirent par gagner la terre. (1)

(1) Tite-Live - Histoire romaine, Livre XXI


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